Il fut un temps où l’on avait besoin de buvard pour ne pas tacher ses cahiers avec de l’encre, il fut un temps également où la publicité n’hésitait pas à rentrer massivement dans l’enceinte scolaire. Il ne fallu pas longtemps pour que les marques investissent cet espace et que des collections commencent à se constituer.
N’ayant absolument pas connu cette époque, j’ai commencé la mienne, au hasard des bourses de collections, au début des années 2010. D’abord consacrée à l’alimentation (j’adore la bouffe), ma petite collection se recentra sur les magasins au fur et à mesure que mon appétit pour l’histoire de la grande distribution grandissait.
Ce qui est passionnant avec les buvards, c’est qu’ils sont un vaste témoignage de la société consommation de l’après-guerre et par conséquent du commerce d’alimentation d’avant les grandes-surfaces. Petit tour d’horizon de ma collection, classée par type de magasins.
Le Familistère
Avant toute choses, voici mon premier sur ce thème, une jolie façade en papier rouge et verte. Quand je l’ai trouvé, je ne connaissais pas vraiment cette enseigne qui a disparu dans les années 70 au profit du nom Radar mais ce fut un véritable coup de cœur. (Depuis j’ai plein de trucs sympas sur le Familistère, je vous montrerai)
Docks, Comptoirs, Économiques, des succursalistes.
Une maison mère, des magasins dispersés un peu partout dépendant directement du siège, ce sont les succursalistes.
Les Docks du Nord
Les Docks du Nord, sont des magasins historiques de la région. Leur marque « Corso » donnera son nom à une supérette dans les années 70. D’ailleurs c’est tout le groupe qui muera dans les années 70-80 pour devenir Match. Le siège social des supermarchés Match est toujours installés à La Madeleine (59), à l’ancien siège des Docks.
Sur cet autre buvard, on peut voir la mascotte des Docks , un petit épicier qu’on retrouve régulièrement sur d’autres documents.
Les Docks Bourguignons
Complètement liés aux buvards, les protèges cahiers pouvait être aussi publicitaires à l’époque. Ici un pour les Docks Bourguignons (aucun liens avec les précédents). Le buvard date sûrement d’avant 1965, date à laquelle Les Docks Bourguignons, déjà unis avec Les Docks Franc-Comtois, sont devenus CEDIS (Centre-Est Distribution) . Cedis, c’est la fusion de 4 entreprises qui exploitèrent différentes enseignes avant de disparaitre avalé par Casino, vers 1985.
A noter : Le protège cahier était fabriqué à Valenciennes dans le Nord et illustré par un certain R. Jacquet.
Les Économiques (Bisontins)
Ces buvards là aussi datent à coup sûr, d’avant 1965 !
Les Économiques, fondés à Besançon, fait partie des 4 entreprises réunies cette année là pour former CEDIS.
Pour en savoir plus sur CEDIS :
Un article de l’Est Républicain
J’aime particulièrement celui-ci avec un petit oiseau, sorte de cousin très lointain du rouge-gorge d’Auchan 20 – 30 ans plus tard.
Les Comptoirs Français
Un succursaliste célèbre : les Comptoirs Français. Je trouve le buvard absolument magnifique avec ses jeux de silhouettes et si le protège cahier est plus classique, il en n’est pas moins élégant.
Les Comptoirs, créés en 1897, à Reims, ont disparus en 1975. Néanmoins, ils eurent le temps de laisser une trace dans le commerce moderne en ouvrant un hypermarché « La Montagne », à Cormontreuil, en 1969. Sans doute le premier hyper de la Marne. Toujours ouvert, le magasin est aujourd’hui un Cora.
Goulet-Turpin
Toujours à Reims, comment terminer ce petit voyage dans les succursalistes des années 50/60 sans évoquer Goulet-Turpin ?
Probablement le succursaliste rémois le plus connu, l’aventure Goulet, commence en 1874, soit 30 ans après Félix Potin et 24 ans avant Casino, Goulet fait donc partie des pionniers de la distribution. Si quelques décennies plus tard, Potin loupe le coche de l’après-seconde guerre mondiale, Goulet-Turpin importe en France le libre service, en 1948 puis le supermarché, 10 ans plus tard, avec l’Express Marché.
Bref, ils sont au top de leur forme, en témoigne ce buvard avec une photo imprimée avec une finesse incroyable pour le support. Un « excellent buvard » comme il le disent eux-même.
Mais l’histoire commerciale est cruelle, alors qu’ils ont initié la France aux supermarchés, les établissements Goulet-Turpin ne passeront pas les années 70. En 1979, malgré les hypermarchés GEM, les magasins de bricolages ou les fast-foods, le groupe disparait, les petits magasins vont chez Promodès, les hypers plutôt chez Euromarché. Dommage !
Pour en savoir plus sur Goulet-Turpin, je vous conseille vivement le site de Laurent Leroy :
https://www.leroy-goulet-turpin.com/index.php
Les Coopérateurs et leurs copains
Concurrents des succursalistes, les coopératives sont, à l’origine ,des magasins créés et gérés collectivement par des consommateurs adhérents. Ces commerces de détail s’inscrivent plus largement dans le mouvement coopératif qui concerne énormément de domaines d’activités. C’est ce qu’illustre le buvard ci dessous qui fait le lien entre les coopératives scolaires et les magasins des Coopérateurs.
Il est illustré par Léon Husson, dessinateur publicitaire prolifique dont une biographie est disponible ici.
Les Produits COOP des Coopérateurs
Voici un buvard pour les produits COOP, manifestement plus récent que le précédent, il date surement de la fin des années 50 ou du début des années 60.
C’est souvent de ces Coop là dont on parle. Si je ne me trompe pas, car c’est assez flou, la marque Coop et les enseignes Coopérateurs / Coop émanent de la Fédération Nationale des Coopérative de Consommation qui permet d’harmoniser la communication d’une bonne partie de ses adhérents.
Contemporain du précédent, celui-ci a une particularité, il faisait office d’étiquettes dans les paquets de biscottes, d’où la mention « Buvard à conserver » et les éléments classique d’un emballage.
Attention, vous êtes prévenus, ce qui suit est très beau.
Ce magnifique buvard date au minimum de 1966, en effet c’est l’année où apparait le logo dessiné par Raymond Loewy, ici sans ses points mais dans une très jolie fleur.
La CCPM, l’autre Coop du Bassin Minier.
La Coopérative Centrale du Personnel des Mines, est une coopérative fondée à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais. Installée à Hénin-Liétard, futur Hénin-Beaumont, elle n’adhère pas à la Fédération Nationale des Coopératives de Consommation, avant 1979. Conséquence : contrairement aux Coop « classiques », elle ne bénéficie ni des produits Coop, ni des éléments de communication de la FNCC, comme en témoigne ce buvard.
S.E.C : La Société Économique de Consommation
Charme et magie des buvards, on y découvre des enseignes qui n’existent plus que sur ce papier. Difficile de trouver des informations sur cette coopérative de Tourcoing (En plus le seul site la mentionnant était un Skyblog, fermé depuis 1 mois, RIP). On en saura pas plus pour l’instant.
D’autres formes de commerce
Le COnsortium Des Epiciers du Centre, tel est le nom complet de Codec est, comme son nom l’indique, une enseigne créée par un regroupement d’épiciers, en 1924. Grâce au logo, on sait que le buvard date d’entre 1965 et 1969, c’est bien d’avoir une fourchette pas trop grande pour une fois. Le détail que j’aime beaucoup, c’est le slogan : « C’est bien meilleur et pas plus cher » pas moins cher, juste pas plus, quoi.
Codec est une des rares enseignes de cet article à avoir passé les années 70 et 80, elle a disparu en 2003 au profit de Shopi et 8 à Huit.
SPAR
Et pour terminer, une enseigne qui existe toujours : SPAR
D’origine Néerlandaise, elle est arrivée en France en 1955. Si aujourd’hui la franchise est gérée par Casino dans l’Hexagone, je ne sais pas dans quelles conditions ouvraient les SPAR à l’époque.
Ce qui est super cool avec ces buvards c’est qu’on sait quasiment tout sur eux.
Le logo ? Une création de Raymond Loewy (encore) en 1968.
L’imprimerie ? Fécomme à Villeparisis, il y a même le numéro de téléphone.
Le nombre d’exemplaires ? 500 000 de chaque (si le nombre indiqué correspond bien à un tirage)
De quand datent t-il ? Mai 1970, ( si la mention sur le côté correspond bien à la date)
Des buvards publicitaires sortis au commencement de la fin.
Un dénommé Marcel Bich a changé la face du monde. Sur les pupitres scolaires, on ne se tache plus chaque seconde. Plus de traces sur le papier, de glissades ou de pâtés
Le bic remplacera la plume et bientôt le buvard redeviendra juste rose.
Ceci tuera cela.
Si vous voulez voir et en savoir plus, n’hésitez pas à aller faire un petit tour sur le site de Didier Buvards (il a un buvard Casino dans sa collection)
https://www.didierbuvards.fr/collection-de-buvards.html
Pour découvrir les autres articles sur la rentrée, c’est ci dessous :
Le catalogue des COOP et les sacs à dos
Allez, la cloche a sonné, rentrez bien et n’oubliez pas vos devoirs